07 novembre 2006

Avalanche de tournois

L'abondance de tournois de haut niveau, aux alentours de la Toussaint, nuit-elle ou non aux échecs ? Autant il peut y avoir, à certains moments de l'année, des trous dans le calendrier, autant les amateurs du noble jeu croulent en ce moment sous les résultats. Qu'on en juge. Alors que se jouait le championnat d'Europe des clubs, le championnat du monde d'Elista s'est achevé le 13 octobre. Le vaincu, Vesseline Topalov, a enchaîné, du 22 au 28 octobre avec le tournoi néerlandais de Hoogeveen où il n'a guère brillé : 2,5 points sur 6 et deux défaites contre la Hongroise Judit Polgar, qui a remporté la compétition ex-aequo avec l'Azerbaïdjanais Shakhriyar Mamedyarov. Quasiment aux mêmes dates (du 19 au 27 octobre) se disputait un tournoi à Barcelone, gagné par le Cubain Lenier Dominguez devant le favori ukrainien Vassili Ivantchouk.
L'avalanche s'est accélérée avec les vacances françaises de la Toussaint, qui ont vu se juxtaposer le tournoi du Cap d'Agde (du 26 octobre au 2 novembre), remporté par un autre Azerbaïdjanais, Teimour Radjabov, et le désormais traditionnel circuit corse, dont le point d'orgue a été le Corsica Masters, gagné aujourd'hui par l'Ouzbek Roustam Kazimdjanov face au numéro 2 mondial, l'Indien Viswanathan Anand. Je passe sous silence une partie de l'actualité espagnole avec l'open de Calvia (du 20 au 29 octobre) et la finale du championnat d'Espagne par équipes (les 3 et 4 novembre), qui a attiré un grand nombre de grands maîtres de classe mondiale comme Peter Svidler, Rouslan Ponomariov, Alexei Shirov, Sergueï Kariakine, Sergueï Roublevski, Ivantchouk, Francisco Vallejo, etc. Alors que le championnat 2006 s'achevait de l'autre côté des Pyrénées, la Bundesliga allemande 2007 a commencé de l'autre côté du Rhin... Tout s'enchaîne donc très vite.
Comme si cela ne suffisait pas, a commencé hier à Moscou, le mémorial Mikhaïl Tal, un des plus beaux tournois de cette fin de saison, que je suivrai pour vous ces jours prochains. L'affiche est impressionnante et mérite d'être citée dans son intégralité : Peter Svidler (n°4 mondial), Alexandre Morozevitch (n°5), Levon Aronian (n°7), Peter Leko (n°8), Boris Guelfand (n°10), Shakhriyar Mamedyarov (n°12), Alexeï Shirov (n°14), Alexander Grichtchouk (n°17), Rouslan Ponomariov (n°20) et le petit prodige norvégien Magnus Carlsen (n°21). Celui-ci, qui fêtera ses 16 ans à la fin du mois, est le seul joueur à moins de 2700 points Elo (avec 2698). Jouant là le premier super-tournoi de sa carrière, il est attendu au tournant par ses petits camarades et a d'ailleurs perdu la première partie avec les Blancs contre Guelfand.
Cette pléthore de tournois est-elle bonne ou mauvaise ? On pourrait, de prime abord, choisir la première réponse et dire que, comme au tennis, où le calendrier fait se succéder les compétitions, cela traduit la popularité du jeu. Mais les échecs professionnels ne sont pas aussi bien structurés que le tennis, même s'ils semblent atteindre une certaine maturité dans des pays comme l'Allemagne ou l'Espagne. Les péripéties cométaires du NAO Chess Club, qui a tout gagné en France et en Europe avant de se voir couper les robinets budgétaires par sa mécène Nahed Ojjeh, montrent que l'Hexagone n'est pas aussi mûr que ses voisins. De ce point de vue, il était donc vraiment dommage que Cap d'Agde et le circuit corse se télescopent. Les grands événements échiquéens ne sont pas si fréquents en France qu'il faille les concentrer en quelques jours. Si la discipline veut gagner en popularité (et donc en couverture médiatique), ce qui doit être l'un des objectifs majeurs de la Fédération française des échecs, elle doit savoir maîtriser son calendrier pour éviter qu'à une phase de gavage succède un régime sec où le public français n'a plus rien à se mettre sous la dent.

4 commentaires:

Cripure a dit…

Fan de votre site !
http://chesslive.hautetfort.com/
Un nouveau site collectif sur les échecs

Anonyme a dit…

Bonjour et content de vous retrouver. Vos réflexions m'inspirent un autre commentaire : je suis régulièrement l'actualité échiquéenne sur le net et je constate que les joueurs professionnels français de haut niveau participent à peu de tournois hors de l'hexagone. Ne serait-ce pas une façon de progresser que de se frotter plus souvent aux forts joueurs étrangers, loin de nos bases ? Etienne, Almira et les autres, s'il vous plaît, moins de poker et plus de perfs en noir et blanc ! Oui, Etienne, la Russie vous va si bien... Rappelez-vous 2005 !

Anonyme a dit…

Ce site est passionnant, bravo pour la précision des infos, la qualité d'écriture et les analyses proposées !
Entièrement d'accord avec le commentaire précédent, ce qui me fait poser des questions : en fonction de quels critères les joueurs choisissent-ils leurs tournois ? Je suppose que les aspects financiers entrent en considération pour une grande part... A t'on une idée de ce que gagne un GMI du top 20, 50 et 100 ? Un MI vit-il de son art ?
L'allusion au poker du message précédent signifie t-il qu'il est courant que les joueurs d'échecs aient des activités ludiques parallèles pour arrondir leurs fins de mois ?

Anonyme a dit…

Bonjour.
Quel bonheur d'avoir un site d'une telle qualité.
J'ai une petite requête:j'aimerais
(et je pense ne pas être le seul) avoir des infos sur cette histoire (et sur l'histoire tout court!) du NAO.
Merci encore et d'avance.